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Channel: Jeux Olympiques 2012 : les JO de Londres » handball
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Quand la Grande-Bretagne s’invente une équipe de handball

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"Ça a toujours été un rêve. Je suis très proche de ma famille britannique, et il y a quelques années, on faisait toujours des petites blagues autour de ça : Ah ! ah ! imagine que tu disputes les JO avec l'équipe britannique !" Ce n'est plus une blague. A tout juste 18 ans, Charlotte Leblanc fera partie cet été de l'équipe de Grande-Bretagne de handball, alors qu'elle était encore en sport-études à Lyon, il y a un an.

Quand Londres a décroché l'organisation des Jeux olympiques 2012, en juillet 2005, il y a d'abord eu un temps d'euphorie. Puis, il a bien fallu se pencher sur les sports olympiques. Car certains d'entre eux ne sont pas vraiment connus outre-Manche. Comme le handball. Il fallait remonter à 1984 pour trouver trace du dernier match de l'équipe nationale masculine, tandis que l'équipe féminine n'avait jamais existé. Mais comment faire pour construire en sept ans une équipe nationale qui ne soit pas ridicule aux Jeux dans un pays sans aucune culture du handball ? Réponse : la binationalité.

Charlotte Leblanc, Marie Gerbron et Ewa Palies sont toutes trois françaises, et elles n'avaient jamais vécu au Royaume-Uni avant cette aventure olympique. Elles n'avaient aussi que des papiers d'identité français, mais toutes ont rapidement pu obtenir un passeport grâce à une mère (Charlotte Leblanc, Marie Gerbron) ou à une grand-mère (Ewa Palies) britanniques. "Il y a aussi des Norvégiennes, des Danoises, des Allemandes, des Suisses", énumère Marie Gerbron. En 2007, alors qu'elle jouait au Havre, en première division, sa mère discute avec un délégué britannique au cours d'un match de Coupe d'Europe, et celui-ci lui fait part du projet de la fédération britannique. "Mais à l'époque, ils voulaient envoyer leur groupe en camp au Danemark, explique-t-elle. J'avais 20 ans, je ne pouvais pas tout laisser tomber pour ça. Mais deux ans plus tard, une coéquipière de club a vu un article qui disait qu'ils avaient abandonné l'idée du camp au Danemark, mais qu'ils cherchaient toujours des joueuses. Alors j'ai envoyé un email." Simple comme un courriel.

UNE VIE DE CLUB POUR RATTRAPER LE RETARD

La méthode de recrutement des néo-internationales britanniques n'a rien de conventionnel. "Il y a quatre ans, alors que j'étais dans l'effectif de Nîmes, en première division, ma mère était en vacances à Londres, et elle est allée voir jouer l'équipe féminine de Grande-Bretagne en amical, raconte Ewa Palies. Elle a commencé à discuter avec les mères des joueuses, puis avec l'entraîneur, qui s'est montré intéressé par mon profil. Ma mère lui a dit : 'Mais vous ne la connaissez pas !' Il lui a répondu : 'On va se renseigner.'" Alors âgée de 19 ans, la jeune femme n'est d'abord pas très enjouée. "J'étais surprise, j'avais toujours considéré que le handball n'existait pas en Angleterre. Je me disais : mais c'est quoi cette équipe ? Je pensais qu'elles ne savaient pas jouer au hand ! Je ne voulais pas jouer dans une équipe comme ça. D'autant que j'avais eu des sélections en équipe de France, chez les jeunes, et que je me laissais encore des chances pour être appelée en A un jour. " Quelques mois plus tard, la raison l'emporte. "Mes parents m'ont fait comprendre que c'était sans doute la chance de ma vie."

Au milieu de ces joueuses fraîchement "rapatriées" se glissent quelques autochtones. Mais pour la plupart, elles faisaient d'autres sports avant d'être recrutées pour leurs qualités physiques, et ne jouent donc au handball que depuis quatre ou cinq ans... Pour gommer les différences de niveau et rattraper le retard abyssal avec les autres nations, la fédération de handball a décidé de réunir toutes ses joueuses à Londres depuis mai 2011. Cela fait donc un an que le groupe vit comme un club : deux entraînements par jour, deux ou trois matches tous les quinze jours face à des clubs danois ou norvégiens… " Le but est de créer des affinités dans le jeu, et on a vraiment progressé, juge Ewa Palies. Par rapport à l'équipe que j'avais vue pour la première fois, il y a quatre ans, ça n'a rien à voir." Et le reste du temps, les joueuses habitent ensemble, dans des petites maisons ou des appartements mis à disposition par leur fédération. "Du coup, il n'y a plus de différences, note Charlotte Leblanc. On porte le survêtement de la Grande-Bretagne tout le temps, on est obligées de parler anglais, on est totalement mélangées. Ce n'est que quand on s'énerve que le français revient !"

LE DÉBUT D'UNE LONGUE AVENTURE ?

A moins de trois mois du but, toutes s'accrochent au même objectif, "atteindre les quarts de finale", conscientes que les médailles sont inaccessibles. Sortir de la phase de groupes ne sera pas non plus aisé pour une équipe qui enchaîne les défaites et dont la seule victoire de référence, qui revient en boucle dans les bouches, a été obtenue en novembre dernier face à l'Angola (22-20), certes octuple champion d'Afrique en titre et huitième des derniers Mondiaux. "Je ne sais pas si c'est un objectif très réaliste", avoue d'ailleurs Charlotte Leblanc.

"Mais l'enjeu de ces JO, c'est surtout de montrer à la Grande-Bretagne que le handball est un sport populaire", reprend Ewa Palies. Car il y aura une après-Jeux, et les trois Franco-Britanniques comptent bien en être. "On va faire partie d'un héritage, les gens ici ne connaissent pas ce sport, mais tout le monde va s'y mettre, s'enthousiasme Charlotte Leblanc. J'ai hâte d'être aux Jeux, d'autant que l'ambiance monte tout doucement ici, c'est super excitant, mais j'ai aussi hâte de l'après-JO, de transmettre le hand aux Britanniques." A condition d'en avoir les moyens, car quel intérêt y aura-t-il à investir dans le handball une fois les Jeux terminés ? "On doit donner une bonne image aux JO pour que les sponsors viennent et que l'on puisse continuer à partir en stage, participer aux éliminatoires des Championnats du monde, lance Ewa Palies. Moi, je veux continuer." Pour que le rêve ne soit pas qu'olympique.

Baptiste Bouthier


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